3,1 kg. C’est la quantité de vêtements par habitant collectée chaque année via les bornes de recyclage ou les déchetteries. En tout, ce sont 204 000 tonnes qui ont ainsi été collectées en 2020. A titre de comparaison, dans le même temps, 517 000 tonnes de vêtements ont été vendus neufs cette année. Mais que deviennent nos vêtements une fois que l’on a fait le vide dans nos placards ? Et qui se charge de gérer la fin de vie ou la seconde vie de notre ancienne garde-robe ?
Trop de neuf, pas assez de collecte
En France, il existe un seul éco-organisme chargé d’organiser la filière de fin de vie des textiles. Anciennement appelé Eco-TCL, il se nomme depuis 2020 Refashion. Son rôle est d’abord de prélever l’éco-contribution obligatoire auprès de l’ensemble des marques de vêtements et de chaussures qui mettent des produits sur le marché français. Le montant de cette contribution (en moyenne 0,9 € par vêtement) est fonction du nombre d’articles mis sur le marché, mais également d’autres facteurs, tels que la durabilité des produits, ou encore l’intégration de matières recyclées. Les sommes collectées par Refashion servent à financer la structuration de la filière et à soutenir les collectivités qui réalisent la promotion de la collecte et du tri des vêtements.
Sur les milliers tonnes de vêtements neufs vendus chaque année, une partie reste stockée dans les placards. Certains sont jetés. D’autres réutilisés. En 2020, 200 000 tonnes ont été déposées dans des points de collecte. Cela ne représente que 40 % du volume de vêtements neufs vendus la même année. Chaque année, on collecte donc beaucoup moins qu’on ne vend en neuf. Dit autrement, on vend trop de neuf et on ne collecte pas assez.
Une fois collectés, via des conteneurs (71 %), des déchetteries (13 %), des associations (11%) ou encore des points de dépôts ponctuels (3 %), les vêtements sont triés. Mais pas tous. Chaque année, environ 50 000 tonnes de vêtements et chaussures sont collectés sans passer par la case tri. Ils sont souvent cédés à des opérateurs non conventionnés ou associatifs qui orientent en direct les articles réutilisables vers des boutiques en France. Et une petite partie, humide ou souillée, est jetée car inutilisable.
95 % des vêtements triés et réutilisables partent à l’étranger
A l’issue de ce tri, environ 56 % des articles sont orientés vers une réutilisation. C’est-à-dire qu’ils seront revendus sur les marchés du vêtement d’occasion, qu’il s’agisse de points de vente associatifs ou de friperies, en France ou à l’étranger. Mais seuls 5 % de ces vêtements et chaussures sont revendus en France. « En trente ans, la crème revendable en France est tombée de 8 % à 5 % de la collecte, tout en représentant 30 % de nos recettes », précise Pierre Duponchel, fondateur du Relais, qui collecte les vêtements, dans Les Echos.
Le reste part pour l’étranger. Au Maghreb et en Afrique Sub-saharienne en priorité. Une partie transite avant cela par le Benelux, la Tunisie et les Émirats Arabes Unis où vêtements et chaussures peuvent être triés plus finement avant d’être réexpédiés.
Un tiers du « collecté-trié » est recyclé
Mais tous les vêtements et chaussures ne sont pas d’assez bonne qualité pour être réutilisés. Environ un tiers des pièces triées est recyclé. C’est-à-dire qu’elles sont transformées en nouveaux produits, en chiffons, en géotextiles, en fibres ou plastiques composites. Les pièces peuvent rester dans la filière textile, mais aussi être orientées vers d’autres secteurs comme le bâtiment, l’automobile ou la plasturgie.
Ce qui n’est ni réutilisé, ni recyclé est transformé en combustible solide de récupération (9,1 %). Il est ensuite brûlé dans des chaudières ou fours adaptés ou en usines d’incinération. Une petite part (0,7 %) est directement incinérée dans un but de valorisation énergétique. Le reste (0,4 %) est incinéré sans récupération de chaleur ou enfoui.
Une filière du recyclage à développer en France et en Europe
Pour Refashion, l’urgence en France et en Europe est de développer une industrie du recyclage des vêtements. « En 2020, la pandémie a mis en évidence l’ultra-dépendance de la filière textile envers le grand export, tant pour l’amont que pour l’aval (exportations des textiles ou chaussures usagés à réutiliser et à recycler). » Lorsqu’en 2020, l’Afrique et l’Asie, confinées, ont stoppé leurs achats, le stockage des vêtements en France coûtant cher, la collecte s’y est arrêtée ».
Il faut donc développer le recyclage. Les vêtements qui vont être recyclés doivent être triés par matière. « Pour que cette étape de tri soit fiable, il est nécessaire d’utiliser des machines », explique l’éco-organisme. Il existe plusieurs technologies de tri automatisé. Et des démonstrateurs installés existent en Europe (en Allemagne, en Suède, aux Pays-Bas). Mais ils sont encore rares et ne permettent pas à l’heure actuelle de recycler efficacement les vêtements en Europe.