En matière d’alimentation, nous sommes nombreux à utiliser des produits surgelés. Or l’impact carbone de nos framboises ou de nos haricots surgelés – d’autant plus quand ils sont cultivés au Kenya – est loin d’être neutre. L’industrie du surgelé, par sa forte consommation énergétique, participe grandement au dérèglement climatique. Fabriquer du froid fait monter la température. Un serpent qui se mord la queue…Il nous a semblé intéressant d’attirer votre attention sur la congélation isochore.
La congélation isochore ne date pas d’hier
C’est un sujet qui fait couler de l’encre depuis quelques mois déjà. Cette méthode de congélation n’est pourtant pas nouvelle puisqu’elle est utilisée depuis 2005 dans le milieu médical pour conserver les organes en vue de transplantation. Ce qui suscite tant l’intérêt ces derniers temps, c’est son application au domaine alimentaire. Car la congélation isochore serait moins énergivore et plus respectueuse des aliments. Et ça, ce serait bon pour nous et pour la planète.
Mais de quoi parle-t-on au juste ?
Le procédé actuellement utilisé par l’industrie : la surgélation
A l’heure actuelle, congeler un ingrédient au niveau industriel consiste à faire baisser très vite sa température interne jusqu’à -18°C en l’exposant à de l’air très froid (- 40°C au minimum). On parle de congélation isobare ou surgélation. Cela provoque la cristallisation en glace de l’eau contenue dans les aliments, ce qui ralentit l’activité microbienne et enzymatique. La surgélation permet une conservation plus longue qu’une simple réfrigération. Mais elle implique également une dépense d’énergie considérable et un respect scrupuleux de la chaîne du froid.
Le procédé de congélation isochore préserve mieux les aliments
Le procédé de congélation isochore consiste à plonger l’ingrédient dans un récipient rigide et hermétique rempli de liquide tel que de l’eau puis de congeler l’ensemble. On utilise une propriété de l’eau : plus la pression augmente et plus son point de congélation diminue. Ainsi, même à -18°C l’eau ne gèle pas et l’aliment est conservé sans être exposé à la cristallisation qui est la principale menace à la préservation gustative des ingrédients. Les chercheur estiment même que les microbes sont complètement détruits lors de ce procédé. La congélation isochore est ainsi à la fois beaucoup plus protectrice et beaucoup moins énergivore. La technique de l’isochore est particulièrement adaptée pour des fruits et légumes fragiles tels que les tomates ou les cerises.
Par ailleurs, et ce n’est pas négligeable, les contaminants microbiens sont également détruits pendant le procédé de congélation.
Enfin, par rapport à la conserve qui nécessite une cuisson à température élevée des fruits et légumes, les vitamines et le goût sont encore une fois beaucoup plus préservés.
Une méthode de congélation plus respectueuse de l’environnement
Mais le principal bénéfice de ce processus de congélation est écologique : selon les scientifiques de l’université de Berkeley en Californie, du département de l’Agriculture des États-Unis et du Service de Recherche de l’agriculture (ARS) si l’industrie alimentaire adoptait ce procédé à l’échelle mondiale, ce sont près de 6,5 milliards de kWh qui pourraient être économisés chaque année tout en réduisant par la même occasion les émissions de carbone de près de 4,6 milliards de kg. Pour vous donner une idée, ce serait comme retirer de la circulation 1 million de voitures.
Des questions en suspens
La faisabilité du procédé, et donc son moindre impact énergétique, paraît évident quand il s’agit de framboises ou de haricots verts (sous réserve qu’ils ne viennent pas du Kenya). Mais que se passe-t-il quand il s’agit d’une tarte aux poireaux ou d’un sorbet citron ? On imagine qu’il faut placer tarte et sorbet dans un sac avant qu’ils soient immergés dans le contenant rempli d’eau. Et si on imagine bien, cela fait double emballage…
Par ailleurs, l’isochore est une technique qui semble demander beaucoup d’eau sans que cette dernière puisse être réutilisée. Ce n’est pas une bonne nouvelle dans un contexte où l’eau va se raréfier, sécheresse chronique oblige.
En conclusion, l’isochore est peut-être une bonne solution pour des endroits où l’on doit préparer en grosse quantité des fruits et légumes comme la restauration collective ou commerciale. Mais au niveau individuel, la meilleure solution reste de cuisiner maison, frais et de saison. Avec un peu de pratique, d’habitude et d’organisation, cela ne demande pas plus de temps que le recours à des produits congelés, isochore ou pas.
Sources (en anglais) :