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Entretien

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Marie Albert : être une femme et randonner seule

Retrouver sa liberté et se reconnecter à la nature.

Marie Albert : randonner seule pour retrouver sa liberté © Marie Albert

Paru le 4 juin 2024, modifié le 9 juin 2024

Ecrit par Perrine de Mon Quotidien Autrement

Marie Albert est journaliste, autrice et aventurière féministe. Et c’est une femme qui randonne seule. Après une première marche en solitaire sur le chemin de Compostelle, et un tour du monde en cargo, l’aventurière s’est lancée, en 2020, dans un tour de France à pied. La journaliste raconte certaines de ses aventures dans son podcast Sologamie, mais aussi dans son livre autoédité La PuissanceElle revient pour Mon Quotidien Autrement sur ses randonnées en solitaire.

Comment en êtes-vous arrivé à voyager seule, à pied, en tant que femme ?

J’ai arrêté de prendre l’avion en 2016 pour des raisons écologiques. Avant, vu que mes parents sont riches, je prenais beaucoup l’avion et je me suis rendu compte que j’avais épuisé mon quota carbone à vie. Sauf qu’à l’époque, je voulais voyager, faire le tour du monde. Je l’ai donc fait en cargo, parce que je pensais que c’était écolo, mais pas vraiment. Maintenant, je voyage à pied, ce qui est encore plus écolo. 

J’ai commencé à voyager seule quand j’avais 20 ans, en commençant par le chemin de Compostelle en 2016. Il y a beaucoup de monde, des hébergements partout, des refuges, le sentier est bien balisé… Comme première randonnée, c’était bien. Je suis partie de chez mes parents en région parisienne. J’ai mis plusieurs années à y aller, puisque je faisais un mois à chaque fois. Je l’ai fait en trois étapes. 

Que retenez-vous de cette première expérience sur le chemin de Compostelle ?

C’était super de découvrir le voyage en solitaire et la randonnée. Maintenant, j’adore marcher. J‘ai rencontré beaucoup de monde, et cela m’a permis de prendre confiance en moi. Après, le problème du chemin de Compostelle, c’est justement qu’il y a beaucoup de gens, et forcément plus il y en a, moins c’est naturel et plus il y a de potentiels agresseurs. Donc j’ai trouvé, comme beaucoup de femmes, qu’il y avait du harcèlement sexuel. C‘est vrai que si on a envie d’être seule, ce n’est pas terrible. 

Mais ça m’a apporté de la liberté, la sensation de pouvoir faire ce que je voulais de ma journée : je marche à la vitesse que je veux, je vois des paysages magnifiques, et j’ai plus confiance en mon corps. Avant, j’avais l’impression que j’étais nulle, que j’avais toujours été la personne nulle en sport, l’impression d’être faible. Et là, je marche avec un sac à dos de 10 kilos pendant un mois, tous les jours, sans un seul jour de pause (je ne conseille pas de faire ça). À la fin, j’étais épuisée, mais mon corps s’était transformé. Ça m’a donné envie de reprendre cette liberté à d’autres moments. Puis, j’ai déconstruit tout ce qui était un confort bourgeois, moderne : avoir des toilettes, avoir une douche, avoir de l’électricité, avoir Internet, avoir à manger dans un frigo. Petit à petit, je me suis dit qu’on pouvait trouver des alternatives en randonnée. 

Comment avez-vous commencé votre tour de France ?

J’ai fini Compostelle en 2019, et l’été 2020, je suis partie de Dunkerque, donc de la frontière belge, pour faire la côte atlantique. Je suis partie 3 mois. Le but c’est de faire le tour des côtes et des frontières de la France, j‘appelle ce périple le Survivor Tour. C‘est un tour de France à pied contre les violences sexistes. Je dors dans la forêt, sous ma tente, toutes les nuits. L’idée c’est de me réapproprier l’espace public. Par ma présence sur le chemin, je voulais montrer que j’ai le droit d’être là comme n’importe qui, que je peux dormir dans la forêt et que rien ne va m’arriver, de toute façon, je sais me défendre.

Chaque été, je fais quelques mois de marche. Les gens que je rencontre, à chaque fois leur réaction, c’est : « Ah mais vous êtes toute seule, c’est dangereux, mais vous n’avez pas peur ? Je ne laisserai jamais ma fille faire ça ». Ce sont toujours les mêmes réflexions alors qu’on est en 2024 et qu’il y a plein de randonneuses solo. Si j’étais avec un homme, là, ils n’auraient aucun souci.

Ce tour de France, que vous apporte-t-il ?

Encore une fois plus de confiance en moi, plus de bonheur, plus de joie dans la nature. Je suis de plus en plus à l’aise. Par exemple, dormir sous la tente la première année, c’était compliqué. J‘avais intériosé les peurs liées à la nature, à la nuit, à la forêt, aux agresseurs, etc. Et puis au fur et à mesure des années, j’ai de moins en moins peur la nuit, je sais quel bruit correspond à quel animal, j’ai acheté du matériel de plus en plus confortable, je peux porter un sac de plus en plus lourd…

L’été dernier, je traversais les Pyrénées, et l’enjeu, c’était qu’il fallait aussi transporter la nourriture, donc j’avais un sac de 14 kilos, et j’ai réussi ! Maintenant, je sais aussi que je fais des pauses. Je fais trois jours de marche, un jour de pause et je prends le temps qu’il me faut. Je revendique le fait d’aller lentement. Ça me sert à quoi de souffrir, alors que je suis là pour profiter, et je n’ai pas besoin de prouver quoi que ce soit. 

J’ai déjà fait 4 000 km de Dunkerque à Banyuls, à la frontière espagnole, et en septembre, je pars sur la côte méditerranéenne pour deux mois. Ici, le défi va être de trouver des forêts où bivouaquer, sachant que c’est beaucoup de stations balnéaires. Mais j’ai trop hâte, parce que c’est le moment de l’année que je préfère ! 

Voyez-vous la randonnée comme un moyen de voyager en respectant la nature ?

Quand je parle de mes randonnées, j’aborde d’abord le côté féministe. Alors qu’évidemment, randonner, c’est le moyen de voyage le plus écologique et en même temps, le plus lent au monde. Je ne consomme pratiquement ni électricité, ni eau. Quand je prends des sandwichs, je consomme certes un peu de plastique mais c’est incomparable à une vie urbaine. Je me lave tous les quatre jours. Chaque fois que je n’ai plus qu’une barre sur mon téléphone, je me dis qu’il faut économiser. 

J’ai grandi dans un village, mais je n’avais pas vraiment de contact avec la nature. Je ne savais pas distinguer un arbre d’un autre, une plante d’une autre. Qu’est-ce qu’on peut manger ? Qu’est-ce qui est dangereux ? À force de randonner, j’ai commencé à me dire,  » tiens, c’est intéressant. J’aimerais bien connaître le nom de cet arbre, le nom de cet animal, le nom de cette fleur « . Et puis tout d’un coup, je me suis passionnée pour le potager. C’est vrai que ça crée une nouvelle connexion en quelque sorte.

Avez-vous rencontré des difficultés dans votre organisation ?

Avant de partir voyager, j’étais végane. Donc, j’étais quand même dans ce truc d’écolo, zéro déchet, végane, bio, etc. J’avais ce mode de vie parce que j’étais à Paris, parce que j’étais bien payée. Et en voyageant, je me suis rendu compte que c’était impossible d’être végane. Il y a très peu d’alternatives en France si on va dans des petites épiceries.

Donc, j’ai arrêté d’être végane. Maintenant, je ne le suis que chez moi. Et ça, je trouve que c’est un gros bémol. Il faudrait prévoir tout à l’avance, faire de gros détours, c’est une charge mentale en plus. Je trouve ça intéressant aussi de voir que je ne suis pas une voyageuse parfaite, et que ça n’existe pas.

Avis sur : Marie Albert : être une femme et randonner seule

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