On lui donnerait le Bon Dieu sans confession, lui qui est si traditionnel, si naturel, si simple ! Le pain, ce symbole franchouillard, serait-il devenu une imposture ? En tout cas, Marie Astier donne un sacré coup de boutoir à notre mascotte. La journaliste – elle travaille pour le site écolo Reporterre – a carrément consacré tout un livre au pain intitulé Quel pain voulons-nous ? aux éditions Seuil/Reporterre 2016. Son objectif : révéler ce qui est caché dans notre pain quotidien car, après tout, on sait bien peu de choses sur notre tartine. Pour y remédier, voici un top 3 des informations glanées par la journaliste :
On a appris… l’existence de la farine “améliorée”
Avec des guillemets bien sûr, parce que pas sûr qu’on y gagne au change. Qu’ajoute-t-on à ces farines ? Du gluten, déjà. Il est naturellement présent dans le blé, mais si vous en rajoutez, le pain sera d’autant plus élastique et moelleux. Un début d’explication au boom des intolérances au gluten ? On ajoute aussi des enzymes : “elles ouvrent d’infinies possibilités pour accélérer la fermentation, améliorer la résistance de la pâte à un passage en chambre froide ou à la surgélation, augmenter le volume du pain, rendre la mie plus souple, etc. Surtout, elles permettent de contrôler la fermentation et donc de standardiser toujours plus les processus de fabrication du pain”, assure Marie Astier dans une tribune. On pourrait aussi évoquer l’ajout d’acide ascorbique, qui aère la pâte, mais affadit la couleur et le goût de mie.
Vous l’aurez compris, l’objectif est d’aller vers toujours plus d’industrialisation de la fabrication du pain… et de moins en moins de maîtrise par les boulangers.
Conséquence ? “Ces enzymes ajoutées empêchent celles naturellement présentes dans la farine de faire leur travail. La fermentation, ce moment où se créent les goûts et où la pâte est prédigérée, n’est pas aboutie. En bout de course, notre pain nous fait mal au ventre, et il est insipide », tacle l’auteure, dans une autre tribune.
On a appris… le mot « minotier »
Un minotier, c’est quelqu’un qui gère une minoterie, soit l’endroit où l’on prépare les farines de céréales. Dans une interview, Marie Astier explique : “ll y a 300 petits moulins en France, et 4 grands moulins, principalement, qui produisent 60 % de la farine en France. Ces 4 gros meuniers ont les mêmes procédés de fabrication : ils s’approvisionnent auprès de coopératives ou appartiennent à de grosses coopératives agricoles, on rassemble le blé de plein d’agriculteurs, on le met dans de gros silos, et éventuellement on conserve le tout avec des pesticides. Et on transforme ça en farine, mais on a envie de dire en poudre blanche, pas en farine ! Ce n’est plus un produit vivant, un produit qui vient de la terre, d’une plante, mais une matière première”.
On a appris… que le pain de boulangerie n’est pas forcément meilleur que celui de grande surface
Marie Astier explique, dans une autre interview : « Ça fait longtemps que les grandes surfaces ont des fournils, et qu’elles produisent le pain sur place. Cela représente 9 % du pain qu’on consomme en France. Et il y a de vrais boulangers dans ces fournils. La qualité peut être la même que celle du boulanger de quartier.
Dans l’ensemble, les artisans boulangers n’ont pas réussi à maintenir la maîtrise de leur savoir-faire qui leur aurait permis de continuer à faire un pain différent. Ils ont des farines imaginées pour l’industrie, donc la matière première est la même, et ils utilisent le même type de machines. C’est dommage ! »
Et si vous commenciez par demander à votre boulanger d’où vient la farine qu’il utilise pour fabriquer votre baguette ?
Pour en apprendre encore plus sur le pain, on vous conseille vivement la lecture du livre de Marie Astier, cité plus haut. Regardez s’il est disponible dans votre libraire de quartier grâce à ce site !