Que deviendraient les Français sans moutarde ? Elle a ce petit truc en plus qui ravigote une vinaigrette ou illumine une choucroute. Nous en consommerions en moyenne 1,2 kilo par habitant et par an. Un condiment phare rendu célèbre il y a 600 ans grâce aux ducs de Bourgogne, qui l’ont fait découvrir au roi de France Charles VI.
Eh oui, car avec ses vignobles à gogo, la Bourgogne est la région parfaite pour fournir du verjus (suc de raisin vert) ou vinaigre aux fabricants de moutarde qui s’installent à Dijon. « La richesse de la région fait que la bourgeoisie locale dispose de suffisamment de moyens pour manger de la viande et donc de la moutarde à tous les repas, lit-on sur le site de l’Association Moutarde de Bourgogne. Producteurs et consommateurs sont au rendez-vous. Peu à peu, la culture de la moutarde se développe également dans la région qui sera longtemps autonome pour ses besoins en matière première. Ce sont les charbonniers qui pratiquent la culture de la fleur de moutarde. Après avoir fabriqué leur charbon de bois dans de vastes clairières, ceux-ci sèment dans cette terre riche en potasse, très favorable à la plante ».
La moutarde est rapidement devenue un condiment emblématique de la région, avec la célèbre moutarde de Dijon, dont la recette est protégée par un décret de 1937. Étonnamment, c’est bien la recette qui est protégée, et non le terroir. Il est donc possible de faire de la moutarde de Dijon… à Copenhague avec des graines canadiennes par exemple.
« Plus de 80 % des graines utilisées en France pour fabriquer de la moutarde sont cultivées au Canada »
La Bourgogne a longtemps fourni la France en graines de moutarde mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. « Plus de 80 % des graines servant à la fabrication de la moutarde [en France] sont cultivées dans l’ouest du Canada. Car elles coûtent entre 10 et 15 % moins cher qu’en France. Nos agriculteurs se sont donc intéressés à son cousin, le colza, dont ils peuvent espérer un rendement doublé. Sans compter que le colza a longtemps été subventionné par l’Europe », explique le média Ça m’intéresse.
Face à cela, des moutarderies, notamment l’entreprise familiale Fallot à Beaune, et des agriculteurs se sont mobilisés, dès la fin des années 80, pour relancer la filière. Aujourd’hui, 6 000 hectares sont cultivés en Bourgogne et 300 producteurs assurent la production de 10 000 tonnes de graines de moutarde. L’association Moutarde de Bourgogne a même réussi à faire protéger la moutarde de Bourgogne, qui a obtenu en 2009 une Indication géographique protégée (IGP). Elle garantit que la production des graines de moutarde et du vin blanc, et leur transformation, se déroulent dans la région.
En parallèle, de plus en plus de moutarderies artisanales qui ont le local à cœur se créent — comme celle de Sylvain Petit, une vinaigrerie ardéchoise.
Et vous, que préférez-vous comme moutarde ? La classique, à l’ancienne, à la truffe ou à l’échalote ?
Vous ne parlez pas de la « moutarde du dimanche », d’Orléans. J’ai essayé, elle est très bonne.