Les femmes ont de tout temps contribué à l’agriculture. Mais souvent reléguées à des tâches considérées comme ingrates ou peu valorisantes par leurs pairs masculins, elles sont longtemps restées sous le radar. Ces dernières années, les profils se sont diversifiés, mais la parité n’est toujours pas présente. Qui sont les agricultrices en France ? Tour d’horizon.
26 % de la population agricole
Selon le dernier recensement agricole de 2020, la France compte près de 366 000 hommes chefs d’exploitation et coexploitants, contre près de 130 000 femmes. Soit un peu plus d’un quart de la population agricole, mais toujours loin de la parité. C’est à la fois révélateur d’une progression de la place des femmes dans l’agriculture, comme d’une régression.
En 1970, elles n’étaient en effet que 8 % à être cheffes d’exploitation ou coexploitantes, selon le ministère de l’Agriculture. Les femmes ont longtemps travaillé dans l’ombre de leur mari, sans statut et donc sans droit. Ce n’est qu’en 1982 que les conjointes d’agriculteur ont obtenu le droit d’être considérées comme associées à part entière.
Cependant, la place des agricultrices a régressé au sein de la profession. Elles étaient 132 000 en 1970, contre 130 000 en 2020. Cela s’explique d’une part par le fait que le nombre d’agriculteurs exploitants a fortement régressé en France : il est passé de 1,6 million en 1982, à 400 000 en 2019 (Insee). D’autre part, de moins en moins de conjointes d’agriculteurs sont elles aussi agricultrices (19% en 2019, contre 60% en 1982).
Moins dépendantes des hommes
Les agricultrices ne sont d’ailleurs plus forcément installées avec un conjoint. Les couples de deux agriculteurs ne constituent plus la majorité des cas et on constate l’arrivée de femmes comme responsables ou co-responsables d’exploitation « hors cadre familial », c’est-à-dire non héritières d’une filiation agricole, d’après Valéry Rasplus, sociologue de l’environnement et du genre, auteur du blog Agrigenre. 52% des femmes cheffes d’exploitation sont filles d’agriculteurs, contre environ 80% pour les hommes.
De nombreux groupes ou événements d’échange de savoirs et d’expériences en mixité choisie ont ainsi vu le jour un peu partout sur le territoire. C’est le cas du « groupe femmes » créé par le Centre d’initiatives pour valoriser l’agriculture et le milieu rural (CIVAM) du département de Loire-Atlantique. Celui-ci a été suivi pendant trois ans par les réalisatrices Tesslye Lopez et Isabelle Mandin, ce qui a donné lieu au documentaire Croquantes.
Plus avant-gardistes
Les femmes s’émancipent aussi plus clairement des hommes du point de vue de leur vision de l’agriculture. « Les filles sont plus souvent favorables à l’agroécologie, car elles sont plus souvent issues de milieux non agricoles. Elles sont en avance par rapport aux lycées agricoles sur la question du bien-être animal, qui peut cristalliser des tensions », explique par exemple le sociologue Joachim Benet Rivière interrogé par Terre-net. Les agricultrices sont ainsi plus nombreuses à proposer des alternatives au système agricole dominant de l’agriculture intensive.