L’écologie se fraie un chemin dans les obsèques. Et les Français aspirent de plus en plus à des pratiques naturelles au moment de se séparer des défunts. Ainsi, si le prix reste le premier critère d’achat d’un cercueil, le respect de l’environnement arrive en seconde position, suivi de la fabrication française, selon le 5ème baromètre Cnaf-Credoc.
La crémation, plus écolo que l’inhumation
Ces aspirations se traduisent notamment par un recours accru à la crémation. Cette dernière émet en effet environ 3% des émissions de carbone d’un français chaque année. Une inhumation, en produirait 11%, selon l’Association française de l’information funéraire.
A noter que, depuis plusieurs années, le secteur funéraire s’emploie à réduire son impact environnemental. Depuis 2018, les crématorium doivent être équipés de systèmes de filtration des fumées. Par ailleurs, l’usage des pesticides est désormais proscrit dans les cimetières et les crématoriums.
Des cimetières au naturel
Mais certaines communes vont plus loin. En 2014, est né à Niort, un cimetière naturel. Les défunts y sont inhumés en pleine terre, sans caveau, dans des cercueils en bois non traités, provenant de filières françaises. Les pierres tombales et les fleurs en plastique y sont interdites. Dans la même logique, il est conseillé aux familles d’habiller les défunts en fibre naturelle et de limiter les soins de thanatopraxie, qui consomment beaucoup de produits chimiques.
Le but : créer un refuge pour la biodiversité afin que la vie animale et végétale puisse s’y épanouir. Si bien que ces cimetières s’apparentent à un paisible parc.
Accessoirement, ces cimetières écolo s’avèrent considérablement moins chers que les inhumations classiques.
L’initiative a depuis été reprise à Paris qui a mis en place, en 2019, son premier cimetière écologique à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne). On peut également citer le cimetière d’Aytré, commune mitoyenne de La Rochelle, de Périgueux en Dordogne, ou encore de Plaisance, dans la Vienne.
A Arbas, en Haute-Garonne, c’est une forêt cinéraire qui a vu le jour. Les familles peuvent y enterrer des urnes biodégradables au pied d’un arbre (numéroté afin de bien identifier l’endroit). Un an et demi après son lancement, l’initiative avait été suspendue par la commune pour des questions de législation, réglées depuis : la forêt a rouvert début juillet 2024.
Les nouveaux cercueils
Les cercueils aussi font leur révolution. Selon Ecocert, la construction de cinq cercueils nécessite en effet un chêne âgé de 80 ans. L’organisme affirme également qu’en utilisant des cercueils biodégradables, on pourrait économiser 31 536 km2 de forêt par an, 6 657 600 m3 d’eau et 315 360 000 litres de fuel. De plus en plus, les cercueils en bois non traités sont privilégiés.
Et il existe des alternatives à l’impact environnemental encore plus réduit. Bien qu’encore marginaux, les cercueils en carton se font progressivement une place. Deux distributeurs sont présents dans l’Hexagone. Mais pour disposer de ces cercueils, il faut en faire la demande, car les pompes funèbres ne le proposent pas. Et certains crématoriums les refusent.
Aux Pays-Bas, la start-up Loop a mis au point un cercueil en mycélium, la base du champignon. Celui-ci accélère la décomposition du corps et rendrait l’inhumation totalement neutre en terme d’impact écologique. Son utilisation n’est cependant pas encore permise en France.
D’autres types de sépulture
Au-delà des frontières de l’Hexagone, on voit également apparaître de nouveaux types de sépultures, mais non-autorisées en France.
L’humusation est un processus naturel, qui se déroule sur douze mois et qui vise à transformer le corps en compost. L’humus est ensuite rendu à la famille, qui peut l’inhumer. Le processus a été autorisé dans l’État de Washington aux États-Unis, puis dans le Colorado, l’Oregon, le Vermont et la Californie. En France, deux associations sont nées en 2021, dont Homo Sapiens, pour soutenir ce développement. Elles préfèrent cependant le terme « humification ».
L’aquamation est une alternative à la crémation, qui utilise, à la place du feu, une solution alcaline qui dissout les protéines du corps, la graisse, le sang, pour ne laisser que l’eau. Ce procédé utiliserait dix fois moins d’énergie qu’une crémation classique. « Bien que l’aquamation soit reconnue comme très peu polluante et respectueuse de notre terre, la législation française ne l’autorise pas encore», déplore Michel Kawnik, président de l’Association française d’information funéraire (Afif) », sur Vert, pointant le lobby funéraire : « Ces grands groupes funéraires sont très conservateurs. Ils font pression pour que l’aquamation ne soit pas autorisée. »
Reste que « dans l’histoire de l’humanité, hormis les « inhumations célestes » pratiquées en Inde, en Chine, ou au Népal [le corps, exposé à l’air libre, est mangé par les vautours], il n’y a rien eu d’autre que la crémation et l’inhumation, remarque Manon Moncoq, anthropologue du funéraire, dans Télérama: » L’invention de nouveaux modes de sépultures, plus écologiques, est une révolution. L’inhumation naturelle existe dans les rites musulmans ou juifs, mais sans l’idée de cycle naturel. Transformer le corps en compost, c’est du jamais-vu. »