Enseignant en école primaire depuis plus de trente ans, auteur de Changer l’école de l’intérieur (Actes Sud, 2021), Philippe Viard s’est tourné dès 2005 vers le label éco-école pour obtenir une reconnaissance de son travail, orienté vers le respect de la nature et une pédagogie active auprès des enfants.
Qu’est-ce qu’une éco-école ?
Une éco-école, c’est un établissement et une équipe qui ont envie d’emmener les enfants un peu plus loin sur le terrain de l’écologie et de tout ce qui a trait à la nature. Chaque année, il faut choisir un thème autour de l’environnement : l’alimentation, la biodiversité, l’eau, l’énergie, le climat… Au-delà des thématiques écologiques, il y a aussi une approche différente sur le plan de la pédagogie. Le but, c’est que les actions viennent des enfants et que toute la communauté éducative autour – profs, parents d’élèves, municipalité, associations – les aide à les réaliser.
Comment obtient-on le label ?
En France, il est porté par l’association Teragir. Pour l’obtenir, il faut que la demande ne soit pas seulement développée par les enseignants. Il faut aussi constituer un comité éco-école qui se réunit quatre-cinq fois au cours de l’année avec les enfants. En début d’année, il faut établir ensemble un diagnostic autour de la thématique, pour amener ensuite les élèves à élaborer des actions en phase avec les qualités et les manques de ce qui se fait déjà dans l’école ou à l’échelle de la commune. En fin d’année, un bilan est établi et évalué par un jury. Si besoin, on peut se tourner au niveau local vers des personnes référentes qu’on peut appeler et qui peuvent nous accompagner au cours de l’année.
Comment en avez-vous entendu parler ?
En 2005, dans mon ancienne école, une mère d’élève m’a parlé d’un article qu’elle venait de lire à propos de l’association Teragir, qui commençait tout juste à promouvoir le label éco-école en France. On était déjà branché sur tout ce qui est jardinage, relation avec l’environnement, sur les sorties en extérieur. Elle m’a demandé si on pourrait avoir à notre tour ce label. L’obtenir, c’est une forme de reconnaissance. Ça rend les enfants fiers, aussi.
Comment cette démarche rapproche-t-elle les enfants de leur environnement ?
Pour moi, c’est un moyen de me rapprocher de la vraie vie des enfants, de leur quotidien. Et en ce moment, leur quotidien c’est justement la sécheresse, les inondations, le réchauffement climatique, la perte de biodiversité, les océans qui s’acidifient… Ils ont un vif intérêt pour ces questions. En s’engageant dans la démarche éco-école, ça permet de donner du sens aux apprentissages, de se sentir plus concerné et de dépasser les angoisses. Les élèves réfléchissent à des réponses concrètes, qui leur apportent aussi du bien-être. En faisant un potager, un compost, en observant des animaux et des plantes, ils mettent les mains à la pâte. En connaissant davantage la vie sur terre, c’est plus facile de la respecter.
Est-ce aussi un moyen de changer l’école ?
C’est une démarche qui interroge sur le rôle de l’école, oui. À quoi doit-elle préparer les enfants ? À obtenir un diplôme, à trouver un boulot ? Aujourd’hui, on a plutôt intérêt à préparer les enfants à un futur où les enjeux écologiques sont au centre. Il faut les former à interagir avec le monde de manière raisonnée, à avoir une empreinte la moins forte possible, à agir de manière positive… Il faut leur apprendre à être créatifs, à trouver des solutions par eux-mêmes. Pour y parvenir, ça demande beaucoup de changement dans l’Éducation nationale et plus de liberté pédagogique.