« Le changement climatique se généralise, s’accélère et s’intensifie ». Voilà comment le GIEC (Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’évolution du Climat) résume la situation de la planète dans son Rapport pour les décideurs, publié en août 2021. En une quarantaine de pages, le document, rédigé par 234 scientifiques issus de 66 pays, dresse un constat sombre mais réaliste de l’état de la planète. Après l’état des lieux, suivront les impacts et les solutions dans les prochains volets du rapport prévus en 2022.
En rupture avec le discours ambiant, le rapport indique que le pire n’est pas à venir, mais qu’il est déjà là, sous nos yeux : vagues de chaleur, pluies torrentielles, sécheresse… En chiffres, le constat du réchauffement climatique fait froid dans le dos :
- Les 5 dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées
- La concentration de CO2 (dioxyde de carbone) dans l’atmosphère atteint un niveau qu’elle n’avait pas connu depuis 2 millions d’années.
- La hausse du niveau de la mer a été 3 fois plus rapide depuis 2010 que sur la période 1901-1971.
- La calotte glaciaire du Groënland a fondu 6 fois plus vite dans les années 2010 que dans les années 2000
Ces deux derniers phénomènes – hausse du niveau de la mer et fonte glaciaire- sont perçus comme irréversibles par le GIEC. Il faudra désormais faire avec. Parmi les autres événements quasiment inévitables, le rapport cite : effondrement total de la banquise; changements de courants océaniques; déferlements de vagues et débordements de fleuves, ces phénomènes plaçant les habitants des zones côtières en première ligne de la catastrophe à venir ; pluies torrentielles récurrentes (+7% à chaque degré de réchauffement); vagues de chaleur extrême chaque année si le réchauffement atteignait 4°C. Enfin, le rapport estime à 400 millions le nombre de personnes qui seront confrontées à des pénuries d’eau si la température augmente de 2°C.
L’humain seul responsable… et seul recours
L’autre information-clé du rapport concerne l’origine de ces événements : les scientifiques confirment qu’ils sont dûs presque uniquement à l’activité humaine. C’est d’ailleurs ce sur quoi le GIEC insiste dans les pages de son rapport : sans nous, la planète n’en serait pas là.
Avant de présenter ses solutions courant 2022, le GIEC indique dans les grandes lignes la direction à suivre : il faut impérativement viser un réchauffement maximal de 1,5° par rapport au niveau de 1850-1900 d’ici à la fin du siècle. On ne pourra de toute façon pas faire mieux, mais il faut éviter de faire pire. Et cela implique de grandes mesures à prendre, comme l’explique à GEO Valérie Masson-Delmotte, co-présidente d’un groupe de travail au GIEC : “À moins d’une réduction immédiate, rapide et à grande échelle des émissions de gaz à effet de serre, la limitation à +1,5 °C d’ici à 2100 serait hors de portée.”
Si le niveau d’émissions ne baisse pas du tout, le réchauffement de 1,5°C serait atteint d’ici à 7 ans.
Pessimisme et manque d’ambitions
Depuis la publication, les membres du GIEC ont eu l’occasion de répondre à une enquête de la revue américaine Nature. Elle portait sur leur ressenti personnel face à la crise climatique. Parmi les 92 scientifiques ayant participé, 60% pensent que le réchauffement se situera au-dessus de 3°C. 82% d’entre eux pensent qu’ils seront témoins de catastrophes climatiques de leur vivant. La réalité est bien là : le pessimisme règne dans le milieu scientifique.
Et ce n’est pas l’actualité qui va les rassurer. Quelques semaines après la publication du rapport, la COP26 se déroulait à Glasgow. Cela devait être une nouvelle étape pour présenter de nouvelles ambitions climatiques à l’échelle internationale. Las ! Les objectifs fixés ne permettent que de limiter l’augmentation d’émission de GES à 14 % d’ici à 2030. Alors qu’il faudrait les réduire de 45 % pour viser l’objectif des 1,5°C.
Seule avancée de l’étape écossaise de la COP : plus de 80 États, se sont engagés à atteindre la neutralité carbone. D’ici à 2050 pour certains, un peu plus tard pour d’autres. L’Inde a ainsi fixé le cap de 2070.
Si l’on prend en compte les promesses de la COP 26, la température globale devrait ainsi augmenter, d’ici à la fin du siècle, de 2,7 °C par rapport à l’ère préindustrielle, selon les calculs du Programme des Nations unies (PNUE). Soit quasiment le double de la cible recommandée par le GIEC.