33 jours sans pluie significative ont été enregistrés entre janvier et février en France. Un record. Par conséquence, le niveau de recharge des nappes phréatiques est au plus bas, alors que c’est en hiver que celles-ci se regorgent. Une situation inquiétante pour l’avenir de la ressource en eau et amenée à perdurer.
Une sécheresse doublée d’une canicule d’hiver
« Il s’agit en fait d’une situation chronique depuis 2017, avec une accélération en 2022, a détaillé l’hydrologue Emma Haziza à France Inter. Une somme de signaux faibles est en train de s’accumuler, présentant une année 2023 qui semble problématique. » Selon elle, la situation actuelle résulte du prolongement de la canicule de l’été 2022. « On n’en est jamais sorti », signale-t-elle, affirmant que nous faisons face à une « canicule d’hiver ». « Nous avons eu une anomalie de 5,5 degrés durant les quinze derniers jours de l’hiver de décembre et une anomalie de 5,6 degrés de température au mois d’octobre. Ça correspond à l’anomalie qu’on avait eue en août 2003, durant la canicule, qui était de 5,7 degrés. »
Les quelques millimètres tombés depuis « ont été vite repris par la végétation, sans rejoindre les nappes. À quoi s’ajoutent des températures records qui provoquent une évaporation supplémentaire », a-t-elle précisé au magazine 60 millions de consommateurs. La France se retrouve ainsi dans une situation inédite, alors qu’elle est « à la base un pays tempéré qui n’a jamais manqué d’eau ». « On imaginait que le réchauffement allait toucher surtout l’Espagne, l’Italie et le pourtour méditerranéen, mais toute l’Europe est concernée, en particulier le Nord, faute de pluies majeures. »
Risques et solutions au manque d’eau
Quels sont les risques ? « S’il n’y a pas d’eau dans ces nappes phréatiques il y a aussi un risque d’alimentation en eau potable dans nos robinets. Et si l’on va beaucoup plus loin, ce sont tous nos barrages qui sont censés fournir de l’électricité qui se retrouvent à l’arrêt », poursuit Emma Haziza auprès de RTL, qui pointe un effet domino avec à la fois un risque sanitaire, énergétique et de pénuries de ressources qui affecterait notamment l’irrigation des cultures.
Alors, que mettre en œuvre pour limiter ces pressions sur la ressource en eau ? Limiter le réchauffement climatique qui entraîne sécheresse et canicule, évidemment, en limitant les émissions de gaz à effet de serre. En prenant également des décisions efficaces. Comme arrêter certaines filières par exemple, telle que celle du maïs beaucoup utilisé pour nourrir le bétail, « dont le plus gros besoin en eau arrive en août, au moment où on n’en a plus ». Ou bien en stockant « l’eau tombée l’hiver dans des retenues collinaires » (grâce à la gravité, elles ne pompent pas dans les nappes phréatiques), en recréant des zones humides, en modifiant nos habitudes agricoles via la pratique d’une agriculture de conservation des sols (en vidéo).
Mais aussi en adaptant nos comportements citoyens vers une grande sobriété de l’usage de l’eau au quotidien (douches moins longues, suppression des piscines, appareils électroménagers sobres, …).