Mère de deux enfants, la petite trentaine, Marlène Schiappa a fondé en 2008 le réseau de mères actives Maman travaille. Adjointe au maire (PS) du Mans, déléguée à l’Egalité, depuis 2014, elle est aussi l’auteure d’une dizaine d’ouvrages sur la vie familiale, la vie professionnelle, et la conciliation des deux. Un sujet pour lequel elle milite activement. Parmi ces livres : Les 200 astuces de Maman travaille (Quotidien Malin, 2013), Pas plus de 4 heures de sommeil (Stock, 2014) ou encore, J’arrête de m’épuiser. Comment prévenir le burn-out (Eyrolles, 2015), coécrit avec Cédric Bruguière.
En quoi la naissance de vos enfants a-t-elle bouleversé votre vie professionnelle ?
On revoit notre hiérarchie de priorités, avec des contraintes horaires très fortes et nouvelles : on ne peut plus TOUT donner au travail… En même temps, ça donne confiance en soi. Ça booste énormément. On a envie d’accomplir des choses.
Qu’est-ce qui vous a amenée à créer Maman travaille ?
Je travaillais dans la pub et finissais vers 19 heures, voire plus, le soir. Et la crèche fermait à 17h45. Je me demandais comment faisaient toutes les autres mères pour tout concilier. Et il n’existait absolument rien sur le sujet. A l’époque, on avait des réseaux pros d’un côté et des clubs de mères de l’autre, mais rien sur la conciliation des deux, ce qui me semblait pourtant être LE sujet.
Quelles sont justement les principales difficultés quand on a de jeunes enfants et qu’on travaille ?
La question des horaires et la culture du présentéisme, très forte en France, posent surtout problème. Beaucoup de mères s’en libèrent justement en bifurquant vers du télétravail ou en créant des microentreprises…
Quels conseils donneriez-vous aux mamans pour mieux concilier vie professionnelle et personnelle ?
N’écoutez aucun conseil ! Demandez-vous ce que VOUS vous voulez. Pas ce que votre mari, ou votre voisine ou votre belle-mère veut. Ou ce que raconte tel magazine.
De votre côté, comment organisez-vous votre temps, pour tout concilier ?
Je galère. Je dors très peu et je travaille en permanence, même quand je fais autre chose. Le jeudi, je rentre quand elles dorment déjà. Le samedi, j’ai souvent des obligations. Le reste de la semaine, je cours. Mais je garde un fondamental. Le mercredi, c’est sacré ! J’ai les enfants. Je m’occupe d’elles. Je peux travailler par téléphone ou envoyer des mails, mais je ne prends aucun rendez-vous. Cette journée du mercredi est nécessaire pour passer du temps ensemble à peindre, cuisiner, rigoler, faire du vélo avec mes filles…
Quelles sont les principales améliorations à apporter pour qu’il soit plus facile de concilier enfants et boulot ?
Les pouvoirs publics doivent s’investir sur le sujet, renforcer les modes de garde… De leur côté, les employeurs doivent revoir leurs grilles d’évaluation basées sur la présence, et leurs modèles d’articulation des temps de vie. Et les mères cesser de s’autocensurer…
Votre dernier livre s’intitule « J’arrête de m’épuiser. Comment prévenir le burn-out. » Avez-vous quelques conseils à donner à nos lecteurs et lectrices, à ce sujet ?
Toujours rester en contact avec ses propres besoins, y compris physiologiques. Combien de jeunes mères disent : « Je n’ai pas eu le temps de boire aujourd’hui ! » ou « Je n’ai même pas fait pipi ! ». L’idée avec ce livre est de colorier une batterie cartonnée*, pour avoir une idée de son niveau d’épuisement…
Arrivez-vous à suivre les conseils que vous apportez dans vos livres ? Vous arrive-t-il de vous sentir, vous-aussi, débordée ou épuisée ?
J’ai du moins une conscience aigüe des signaux d’alertes de l’épuisement. Quand je sens que je suis à 7/10, je commence à appliquer le programme « j’arrête de m’épuiser » ! Mais sinon, au quotidien, je suis aussi souvent débordée. Je rate mon train, j’arrive en retard… Mais j’ai appris à lâcher prise, à renoncer à vouloir être parfaite, à être moins exigeante vis-à-vis de moi-même. Je pense que c’est la clé.
Vous semblez effectivement avoir des semaines très chargées. Quand avez-vous le temps de vous reposer ?
Je ne me repose pas particulièrement, mais je fais des choses que j’aime et qui me rendent heureuse. C’est un bon moyen, je crois, pour puiser de l’énergie. Je chasse aussi les ondes ou personnes négatives, ne m’entoure que d’amis ou de gens bienveillants. C’est énorme la fatigue en moins quand on n’a pas à gérer de mauvaises ondes. Les journées ne font que 24 heures. On doit choisir à quoi on consacre ses pensées et son tonus.
Vous évoquez souvent la juste répartition des tâches à la maison. Est-ce le cas chez vous ? Est-ce indispensable selon vous ?
Le père de mes filles est un « vrai » père, dans le sens où il repère les besoins des enfants et y répond autant que moi. Je n’ai pas besoin de lui dire « mets leur un gilet » ou « pense au chèque pour la cantine » ou « il faut leur donner un bain ». Il y pense et le fait autant que moi. Après, il travaille dans une autre région, part tôt le matin, rentre tard, donc forcément… Et concernant le ménage, ce n’est pas un sujet sur lequel je me prends la tête. Je suis plutôt bordélique, les « piles » des vêtements ou de documents et les câbles de connexion, c’est une déco qui me va très bien !
* « J’arrête de m’épuiser. Comment prévenir le burn-out », propose des conseils pour changer son quotidien, des exercices et des tests pour faire le point et aller à l’essentiel, mais aussi une batterie imprimable à colorier pour suivre ses progrès.