Anna Kotelnikov, 20 ans, est violoniste et directrice artistique de l’Orchestre du Nouveau Monde. Cet orchestre symphonique réunit depuis plusieurs années, et plus officiellement depuis début 2022, des musiciens amateurs ou en cours de professionnalisation. Moyenne d’âge : 20 ans. Leur souhait ? S’engager pour l’écologie et la justice sociale à travers leur musique. Ses membres ont joué lors de marches pour le climat ou dans la dernière vidéo, « Glacier », des militants écologistes Camille Étienne et Solal Moisan. Anna Kotelnikov revient pour Mon Quotidien Autrement sur son fonctionnement.
Quelle est la genèse de l’Orchestre du Nouveau Monde ?
C’est un projet qui s’est monté de manière organique dans le temps. Il s’est construit à partir d’amis d’enfance qui se connaissaient depuis leur 5 ou 10 ans et faisaient de la musique ensemble dans des orchestres, puis avec leur amis d’amis, par le bouche-à-oreille, etc. Un jour, l’un d’entre eux, Étienne Jarrier, a proposé une réunion un peu plus grande pour enregistrer des pièces et il y a eu une première vague de recrutement. C’était il y a un an et je suis arrivée à ce moment là. L’orchestre a donc commencé à des moments différents pour plein de personnes. Mais début 2022, on a cofondé l’association et c’est devenu plus officiel. Maintenant, on est une batterie de 120-150 personnes avec des musiciens professionnels comme des amateurs, avec 60 à 70 personnes disponibles pour faire des répétitions toutes les six semaines.
Qu’est-ce que ça veut dire concrètement un « orchestre engagé pour la justice sociale et climatique » ?
L’orchestre est composé de personnes qui aiment la musique ou veulent en faire leur métier, mais qui au bout d’un moment se sont demandées pourquoi elles faisaient de la musique. Arrive un moment où on ne peut plus faire que de l’art. C’est un besoin général pour tous les participants de donner du sens à sa pratique artistique, car l’orchestre engagé ou la musique classique engagée, ça n’existe pas beaucoup. Nous, on souhaite créer un mouvement commun d’espoir, d’ambitions, de se donner la force de faire ce qu’on aime en montant des projets qui ont du sens.
Concrètement, ça s’incarne de manière pratique dans nos moyens de production : on essaye de manger végétarien lors de nos répétitions, on se pose des questions pour avoir le moins d’impact lors de nos déplacements ou pour faire notre communication. On écoute aussi des podcasts ou on regarde des films ensemble, pour que l’orchestre soit aussi un laboratoire de réflexion. On a aussi monté un groupe d’actions, qui fait des actions militantes dans le sens plus commun du terme. Et en matière de justice sociale, on est très conscients que la musique classique est un domaine de blancs privilégiés, alors on essaye de trouver des manières d’inclure plus largement : on évite de faire des recrutements de personnes qui sortent des meilleurs conservatoires et ont déjà énormément d’opportunités, on va plutôt se présenter dans des conservatoires en banlieue. On met aussi en place des tarifs spécifiques lors de nos résidences pour qu’il y ait toujours plusieurs personnes qui puissent participer gratuitement.
Mais plus largement, on s’interroge sur le « nouveau monde » qu’on a envie de construire ensemble, à travers nos projets.
Comment l’art et la musique en particulier peuvent-ils jouer un rôle dans la crise écologique ?
C’est une grande question. Je suis persuadée que l’art a une place cruciale parce qu’il a cette capacité d’amener des questionnements. L’art peut nous guider à différents endroits pour mieux penser et concevoir le monde, y compris pour discerner nos comportements problématiques. Surtout, notre rôle dans la musique ou dans l’art, je dirais que ce n’est pas de trouver des nouvelles matières innovantes, de faire de nouvelles découvertes, mais de proposer de nouveaux récits et imaginaires. J’ai l’impression que l’art peut porter un message engagé. C’est un véhicule hyper puissant, un médium d’expression qui touche à un autre niveau que les informations ou qu’un amas de chiffres. Ça éveille une autre zone de sensibilité. Mêlée à des mots, la musique porte un message encore plus puissant que des mots tous seuls. Et elle porte en elle la magie de pouvoir rassembler des publics différents, qui vont pouvoir être amenés vers un sujet comme l’écologie.
Où vous entendre prochainement ?
Nous sommes en train de terminer la préparation d’une création autour de Pierre et le Loup, à partir d’un texte réécrit. Nous le présenterons le 22 janvier à Chatou en banlieue parisienne, à l’école Perceval, lors d’une représentation ouverte au public, ainsi que samedi 28 janvier dans le cinéma Louis Jouvet de la même ville, à la fin du festival du film d’écologie. Nous présenterons ensuite cette création principalement dans des écoles, avant de la rejouer le 13 juillet au château de Chambord.
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