Elise Bricoult est diététicienne en Belgique depuis 2008. Sur son profil LinkedIn, la professionnelle de la nutrition milite pour faire connaître son métier et inclure la diététique dans les axes de prévention en santé. Son cheval de bataille ? Encourager la consultation diététique annuelle, comme chez le dentiste.
Pouvez-vous nous expliquer votre rôle en tant que diététicienne ?
Le métier de diététicien est très vaste. Chaque diététicien se spécialise en général dans un domaine. En effet, tout le monde mange, mais tout le monde a des besoins nutritionnels spécifiques. En fonction du stade de la vie, on n’a pas les mêmes besoins, ni les mêmes problèmes.
Je prends en charge trois types de patients. J’accompagne les mamans qui doivent gérer les enfants, leur travail, et qui sont dépassées par l’organisation des repas. Je les aide à élaborer des repas rapides à préparer, sympas et équilibrés. Je collabore aussi avec des médecins, pour les patients qui souffrent de diabète ou d’hypercholestérolémie. Enfin, j’ai également des patients souffrant de compulsions alimentaires, ce que l’on appelle l’hyperphagie boulimique.
Si l’on veut résumer le métier de diététicien, nous pouvons dire que l’on aide les gens à changer leurs habitudes alimentaires pour une meilleure hygiène de vie. L’aide diététique ce n’est pas seulement le contenu de nos assiettes, ça sert aussi à garantir la bonne santé des patients.
Quelles sont vos méthodes de travail ?
Le but du jeu, c’est de pouvoir rendre le patient acteur de sa prise en charge, afin ne pas lui imposer un type d’alimentation. Pour cela, je fais tout pour que la consultation soit ludique, agréable et qu’il comprenne bien pourquoi il doit faire tel ou tel changement. Il trouve les solutions à ses problématiques par lui-même, grâce à des jeux, des outils.
Chaque patient est différent. La solution à laquelle on va réfléchir avec le patient A ne sera pas la même qu’avec le patient B. Nous sommes la boîte à outils et le patient va aller puiser dedans, chercher ce qui lui convient en fonction de sa situation personnelle ou de ses enjeux. Il s’agit d’un échange, d’une réflexion permanente.
Sur LinkedIn, vous parlez beaucoup de « prévention en santé », pouvez-vous nous expliquer ?
Bien souvent, chez les patients qui viennent consulter, le diagnostic est déjà là. Il s’agit d’un problème cardiaque, par exemple, d’un diabète déjà installé, d’un surpoids, etc. Mais, dans la profession, nous aimerions que chacun apprenne à bien manger avant que le problème n’arrive.
La consultation diététique devrait être préventive, au même titre que la consultation dentaire. Je milite pour que les patients viennent une fois par an faire un check-up, poser leurs questions, venir piocher de nouvelles idées de recettes, réadapter leurs repas, etc. Et plus particulièrement ceux qui changent de travail, qui se mettent en ménage. Face à de nouveaux modes de vie, chacun devrait pouvoir se dire « je suis un peu perdu, j’ai besoin d’idées ». Ou simplement venir vérifier que tout va bien.
En Belgique, certains patients bénéficient d’une ou deux séances par an qui sont remboursées, notamment les patients diabétiques. Pour eux, c’est déjà plus naturel d’aller faire un check-up annuel. Une certaine partie de la population a déjà pris ce pli-là, mais ce n’est pas la majorité.
Il y a encore beaucoup trop de personnes qui ne sont jamais allées consulter une diététicienne. Ça fait parfois un peu peur, on se demande ce qu’il va s’y passer. Il faudrait que tout le monde soit à l’aise d’aller consulter, de parler de son alimentation, de poser des questions, que ce ne soit pas un tabou dans la société.
Pourquoi ce n’est pas déjà le cas, d’après vous ?
Il y a beaucoup d’a priori sur le métier. Le mot « diète » en anglais, signifie « régime », donc le mot « diététicien » n’est peut-être pas bien choisi à la base.
Les médecins ne savent pas toujours nécessairement comment se déroule une consultation. Il nous faut donc communiquer tant auprès du corps médical et paramédical qu’au niveau du grand public.
Quels sont les points de vigilance à avoir sur notre alimentation ?
Un élément sur lequel nous sommes très attentifs, ce sont les aliments ultra-transformés. Quand on a des troubles digestifs, par exemple, l’un des premiers conseils est de réduire ce type d’aliments, afin de soulager les intestins et de retrouver une muqueuse intestinale qui fonctionne bien, en bonne santé.
Ensuite, je fais beaucoup de prévention par rapport aux contenus sur les réseaux sociaux et sur Internet. Il y a quand même beaucoup de conseils faux, voire dangereux, qui circulent via des personnes qui ne sont pas correctement formées à la nutrition. Il faut être attentif à la qualité de l’information et ne pas tout prendre pour argent comptant. Je pense, par exemple, à l’huile de coco qui est souvent conseillée, alors qu’elle est beaucoup plus nocive pour la santé cardiovasculaire que l’huile de palme ou le beurre. Il y a aussi l’exemple du jeûne intermittent. Cela peut être très dangereux, surtout lorsque le jeûne est mal mis en place. En général, ce sont les personnes voulant perdre du poids qui vont se lancer dans l’expérience, mais cela va entraîner davantage de compulsions alimentaires, de fringales, etc.
Tout le corps va être impacté par des mauvais conseils, une mauvaise prévention. Nous mangeons tous au moins trois fois par jour. Il faut être très attentif à ce nous mettons dans notre assiette. Je fais souvent le parallèle avec le carburant : chaque voiture a des besoins différents. C’est la même chose pour l’alimentation, elle doit être de bonne qualité et adaptée à chacun. Une consultation préventive annuelle pourrait grandement nous aider à comprendre nos besoins individuels, modifier nos mauvaises habitudes et éviter des maladies coûteuses pour toute la société.
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