Et si on soutenait les restaurateurs écolos ? Fanny Giansetto a créé Écotable pour accompagner le secteur dans sa transition écologique. Cela permet de soutenir puis de labelliser les restos engagés et de proposer une liste d’établissements aux citoyens intéressés.
Vous êtes juriste de formation, à quel moment est née l’idée de créer Écotable ?
J’ai un profil dans l’environnement, une thèse en droit spécialisé sur les questions climatiques et environnementales. Je me suis d’abord impliquée dans des assos comme Notre affaire à tous, qui est responsable de l’action contre l’inaction climatique de l’État français. J’ai eu besoin de faire quelque chose de plus positif et concret. J’avais conscience de l’impact massif de notre alimentation, de là est venue l’idée d’un label de restauration durable.
Je me suis rendue compte que la restauration était plutôt en retard : rien n’était fait pour accompagner les restaurants. Et les clients n’avaient pas d’outils pour choisir les restaurants selon des critères écolos. Au resto, c’est comme si l’aspect plaisir primait sur tout.
D’où l’idée d’un label pour les restaurants durables et de plusieurs outils d’accompagnement et de formation dans les écoles hôtelières et au sein des équipes des restaurants.
Comment se passe la labellisation ?
On a créé un outil de mesure d’impact environnemental. Il faut d’abord que les restaurateurs connaissent l’impact de leurs pratiques pour prioriser leur action. On propose aussi un annuaire de fournisseurs, car c’est dur de dédier du temps à la recherche d’agriculteurs, d’éleveurs, de prestataires de consigne, ou pour valoriser les biodéchets…
Derrière Écotable, Il y a donc un label, de la formation, un annuaire et du conseil
Le plus connu est la labellisation. Pour cela, les établissements demandent un audit environnemental – ce qu’ils payent d’ailleurs, c’est l’audit. On vérifie le cahier des charges et puis on a trois niveaux de labellisation.
J’imagine que beaucoup ont de la bonne volonté mais manquent de connaissance
Totalement. On le voit bien dans les écoles et lycées hôteliers. On s’occupe du modèle écoresponsabilité de l’école Ferrandi : il a été mis en place l’année dernière …
La connaissance est cruciale. Et le temps passé, une fois qu’il sont restaurateurs, à chercher des fournisseurs.
Vous vous occupez aussi des cantines ?
On n’a pas de label car il ne s’agit pas d’un établissement commercial. Mais tous nos outils sont déployés aussi pour la restauration collective. On va plutôt aider ceux qui fournissent les cantines.
C’est quoi le plus compliqué à modifier ? L’approvisionnement des produits? Les déchets ?
Déjà, je ne dirai pas que c’est compliqué. Il y a un double enjeu : la connaissance et le budget. Aujourd’hui malheureusement, être écolo coûte plus cher que ne pas l’être. Nous, on veut faire rimer écologie et économie, mais ça suppose de faire des arbitrages. On promeut plus de végétal, de bio, d’agriculture française. Le gros enjeu, ce sont les déchets. C’est encore plus difficile que l’approvisionnement ! Les professionnels sont formés à utiliser énormément de plastique, se départir de ces habitudes très ancrées est plus compliqué que de modifier le menu.
D’autant que c’est un vrai enjeu pour la santé des clients. Bien des restaurateurs cuisent sous vide, dans du plastique, des poissons, de la viande, des légumes… Le plastique chauffé n’est pas idéal pour la santé. Et le film plastique utilisé pour tout couvrir est à usage unique.
On peut être labellisé Écotable sans être un resto végétarien ?
On regarde le type d’élevage : l’élevage extensif est capteur de carbone, on le valorise. L’intensif empêche la labellisation. Et un resto viandard à 100% aura une note globale plus faible.
En parallèle, vous continuez à donner des cours.
C’est indispensable de former les jeunes générations. J’ai une activité de recherche très importante : je monte un colloque en novembre 2022 sur la prise en compte par le droit des enjeux de l’alimentation durable.
Quelle est votre recette préférée ?
Falafels de pois cassés parce que les légumineuses sont trop peu consommées alors que ce sont des pépites agronomiques qui poussent sans engrais et sans pesticides, et aident les autres végétaux à pousser. Pour la santé, elles sont magnifiques et puis c’est tout simplement délicieux.
A quoi correspondent les labels ?
Pour obtenir le niveau 1, il faut – entre autres ! – que le restaurateur respecte strictement les saisons pour les fruits et légumes cultivables en France et qu’au moins 15% des produits utilisés soient issus de l’agriculture biologique, ou de filières durables. Pour le niveau 2, cela monte à 30 % (et 50 % pour le niveau 3), et il faut que les agrumes ne soient pas traités. Pour le niveau 3, les viandes doivent être 100% françaises et issues de filières durables, les biodéchets doivent être valorisés, aucune espèce de poissons menacés à la carte, etc. Les détails et la liste des restos labellisés sont en ligne ici.
Très intéressant!!
j’adore cet esprit!