Vous pensez que la consommation de viande diminue en France ? Détrompez-vous.
Certes, il y a de plus en plus d’options végétariennes dans les menus des restaurants. Mais cette impression que la consommation de viande se réduit en France ne fait pas le poids face aux chiffres.
La consommation totale de viande a en effet augmenté de 50 % entre 1970 et 2022, passant de 3,8 millions à 5,8 millions de tonnes équivalent carcasse (TEC, unité de poids utilisée pour mesurer des quantités industrielles de viande), selon les données de FranceAgriMer, l’administration chargée du suivi des marchés agricoles. Et la croissance démographique ne suffit pas à expliquer cette hausse. Durant ce laps de temps, la consommation individuelle a augmenté de 12 %.
Rien qu’entre 2021 et 2022, la consommation de viande a continué à progresser de 0,8 %, d’après le dernier bilan de l’Agreste, en charge du suivi des données statistiques au ministère de l’Agriculture. Ici encore, l’organisme explique qu’un tiers seulement de cette hausse s’explique par « une croissance naturelle de la population », les deux tiers restants étant dus à l’augmentation de la consommation moyenne par habitant. Celle-ci est passée de 84,9 kg (équivalent-carcasse) en 2021 à 85,2 kg par habitant en 2022.
Le porc et le poulet en progression
Les viandes consommées ? Parmi les viandes de boucherie, c’est la viande porcine qui est plébiscitée, devant la viande bovine. Entre 2012 et 2022, sa consommation a grimpé de 15 %.
Côté viande de volaille, le désintérêt continue pour la consommation de dinde et de canard. Mais la consommation du poulet est désormais à égalité avec la viande bovine, à hauteur de 1 500 milliers de tonnes équivalent carcasse. Ainsi, c’est surtout le poulet qui a changé dans les habitudes de consommation. Alors que la consommation de viande bovine est restée stable entre 2012 et 2022, celle de poulet a augmenté de près de 50 % sur la même période.
Hausse de la consommation de viande hors domicile
Paradoxalement, les ménages achètent de moins en moins de viande. Ainsi, nous mangeons moins de viande à domicile, mais cette baisse est compensée par une hausse de la demande au restaurant ou en livraison à domicile.
L’institut de l’élevage a ainsi estimé que 24 % des volumes de viande bovine produite ou importée en France en 2017 étaient consommés en restauration.
Pourtant, quand les Français sont interrogés sur leurs pratiques alimentaires, près de la moitié disent avoir réduit leur consommation de viande, et environ un quart d’entre eux se disent flexitariens. « Cette différence entre ce qu’on voit dans les sondages et ce que montrent les statistiques est troublante. Il y a un changement dans les esprits, mais pas encore dans les assiettes. Enfin, pas pour tout le monde », a déclaré au Monde la chercheuse Lucile Rogissart, qui a réalisé plusieurs études pour l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) sur la consommation de viande.
Tous les scénarios de neutralité carbone en 2050 pour la France prévoient pourtant une réduction de la consommation de viande, avec des ampleurs variant de 20 % à 70 %, et la stratégie nationale bas carbone adoptée par la France fixe bien une trajectoire de baisse, dans la fourchette basse de 20 %. Réduire la consommation de viande répond également aux objectifs de santé publique, la viande, tout particulièrement la viande rouge ou transformée, entraînant des effets négatifs sur la santé, lorsque elle est consommée en grande quantité.