Si pour vous, le saké est cette liqueur de riz, cet alcool fort, que l’on sert souvent en fin de repas dans les restos asiatiques, oubliez tout ce que vous pensez connaître de cette boisson japonaise ancestrale, car il s’agit là de saké chinois. Cette semaine, nous vous parlons de saké japonais. Le vrai. Issu de la fermentation du riz et dont le degré d’alcool varie entre 14° et 18°.
Depuis peu, on en produit aussi en France, à Pélussin, petit village de la Loire, perché dans les hauteurs du massif du Pilat, en région Auvergne-Rhône-Alpes. L’histoire débute il y a quatre ans, quand Grégoire Boeuf, un trentenaire originaire d’Annecy, part en vacances au Japon avec sa famille. « C’est là que j’ai été en contact avec le vrai saké pour la première fois. Nous en avons d’ailleurs bu abondamment pendant tous le séjour », raconte-t-il. A son retour, il en ramène dans ses bagages pour en faire goûter à un ami qui (improbable hasard !) connaît un importateur de saké installé à moins de 100 kilomètres, dans la ville de Montbrison, toujours dans la Loire.
Le saké, un savoir-faire précieux au Japon
La question arrive au détour d’une conversation de fin de soirée, comme une boutade : « Pourquoi n’en faites-vous pas en France, du saké ? Et pourquoi, nous, on n’en ferait pas ? » Étrangement, cette idée qui paraissait complètement farfelue le soir-même, apparaît encore alléchante le lendemain. Grégoire Boeuf se lance ainsi dans l’aventure. Il prend six mois de cours intensifs de japonais, puis part se former durant près d’un an au pays du Soleil levant, sept mois auprès d’un brasseur de la préfecture de Tottori et quatre mois dans un restaurant de la capitale nippone pour apprendre le service du saké. Lorsqu’il revient à Pélussin, en août 2016, il entame la construction de sa brasserie, Les Larmes du Levant. La production est lancée l’année suivante.
Pas question pourtant de produire seul cette boisson « presque chamanique ». La fabrication du saké est un savoir-faire précieux, qui demande des années d’apprentissage. Rares sont les étrangers à pouvoir s’introduire dans ce cercle d’initiés. Pour la production, Grégoire fait donc appel à un tôji, l’équivalent d’un maître de chais, et d’un kura bito (un employé spécialisé), tout droit venus du Japon. Les deux Japonais élisent domicile à Pélussin sept à huit mois par an, le temps de la production (qui se déroule plutôt durant les mois les plus froids). « A terme, l’idée est de former des Français pour développer la production », explique Grégoire.
Initier les palais français au saké
Pour le moment, le riz est lui aussi importé du Japon, car il est bien plus facile de trouver les bonnes variétés de la céréale, adaptées au brassage, mais Grégoire reste attentif à ce qui se fait en France. « Je sais que des essais sont réalisés en Camargue, pour cultiver du riz à saké », raconte-t-il par exemple.
Le but de Grégoire, c’est aussi d’initier les palais français au bon saké et d’adapter cette boisson à la gastronomie française. « Le saké se boit comme du bon vin, tout au long du repas. Et il peut se marier avec un nombre infini de plats : du foie gras, au fromage, en passant par les desserts… Il faut savoir le choisir et faire les bonnes associations de saveurs. »