Et si les catastrophes pouvaient donner naissance à des mouvements citoyens positifs ? Depuis l’accident nucléaire de Fukushima, de plus en plus de Japonais changent de mode de vie et de pensée pour lancer des initiatives écologiques et constructives.
On peut bien sûr citer l’exemple de Naoto Kan. Le premier ministre du pays en 2011 croyait dur comme fer à l’industrie nucléaire et au savoir-faire des ingénieurs nippons avant l’accident. Depuis, il est devenu la rock star des mouvements anti-nucléaires, parcourant le monde pour convaincre du bien-fondé de l’arrêt de l’énergie atomique.
Après Fukushima, des citoyens engagés
Ce sont aussi des citoyens comme les autres qui, de plus en plus, remettent en question leur mode de vie. Mathilde Julien et Jonathan Carène, un couple de trentenaires passionnés par le Japon, partis vivre plusieurs mois sur l’archipel, en ont fait un documentaire, intitulé Dekiru (« c’est possible », en japonais).
On découvre par exemple Fujino. Cette ville de quelque 10 000 habitants, située à 1h30 de Tokyo, dans la préfecture de Kanagawa est l’une des pionnières en matière de transition écologique. On y pratique la permaculture ; on y utilise (avec succès) une monnaie locale ; depuis 2011, ses habitants tentent de se réapproprier la production d’énergie. Pour cela, ils installent dans la cité des panneaux solaires et des batteries en libre accès.
Se réapproprier la production d’électricité
Un peu partout les initiatives de production locale d’énergies renouvelables se développent. Le département de Fukushima a décidé de bannir la production électronucléaire pour atteindre 40 % d’énergies renouvelables en 2020 et 100 % en 2040.
Des centrales électriques renouvelables sont (co)financées par des fonds citoyens à Miyama City, ou à Iida City. Certaines grandes coopératives de consommateurs traditionnelles se lancent dans la production et le négoce d’électricité. Elles investissent dans les énergies renouvelables (le solaire le plus souvent) et approvisionnent ensuite leurs membres et d’autres foyers en électricité.
Le documentaire Dekiru nous fait aussi découvrir plusieurs éco-villages ; celui de Saihate par exemple, qui s’est formé à la suite de l’accident nucléaire. Là, les habitants ont construit leurs maisons en terre et matériaux trouvés sur place (earthbag houses). Ils tentent de trouver une harmonie dans la vie en collectivité. Le docu nous emmène encore à la rencontre de Shunzo Tanaka. Ce Tokyoïte est venu s’installer avec sa famille sur l’île de Yakushima dont les paysages ont inspiré les décors du film d’animation Princesse Mononoké. Ils font pousser leurs légumes, construisent leur habitation, récupèrent les huiles usagées des restaurants pour alimenter leur voiture…
Agir par soi-même
Partout, dans le pays, des individus et des communautés ont ressenti le besoin de se tourner vers plus d’écologie après le drame de Fukushima. « On a voulu créer un monde différent. On s’est senti en danger, raconte Jun Omura, formateur dans la transition town de Hamamatsu. […] Je pense que cela a eu lieu dans tout le Japon . On s’est dit qu’il fallait agir. Diverses initiatives et communautés ont vu le jour. […] Il faut agir par soi-même. Ce n’est pas le système qui fait bouger les gens. Ce sont les gens qui par leurs actions, font le système. »