Huit Français sur 10 se disent inquiets face au changement climatique, d’après le rapport 2023 du Conseil économique social et environnemental (CESE) sur l’état de la France. Quelle réponse à cette éco-anxiété quand tout semble aller au plus mal d’un point de vue environnemental ? Comment garder l’espoir ?
Ils sont quatre, une militante, une journaliste, un humoriste et un climatologue, à ne pas se laisser abattre. Ils nous donnent de bonnes raisons de garder espoir.
Camille Étienne, militante écologiste
On nous dit : prends soin de ta santé mentale… Mais l’éco-anxiété n’est pas une maladie, c’est une réponse saine à un monde malade. C’est normal d’être angoissé, d’avoir envie de fuir. Quand on s’y confronte, et qu’on ose ralentir, bifurquer, agir, on trouve au bout du chemin énormément de joie. Contrairement à ce qu’on pense, les militants sont les personnes les plus joyeuses que je connaisse. Parce que demain n’est pas écrit. Et comme dit l’écrivaine américaine Rebecca Solnit, l’espoir naît de l’incertitude. On a déjà renversé des dictatures, des systèmes de domination tellement énormes, ancrés, violents. Aujourd’hui, on peut dévier d’une direction qui nous condamne. (Télérama)
Nicolas Meyrieux, humoriste
Quand j’étais plus jeune, j’étais un peu idéaliste et je pensais qu’on pouvait changer le monde. Plus tard, j’ai compris qu’il fallait changer son monde à soi. J’aime beaucoup citer le film de Coline Serreau, « Solutions locales pour un désordre global ». C’est la seule chose qu’on puisse faire, trouver des solutions localement pour gérer le problème globalement. Sinon on n’y arrive pas, on est trop petits face à l’immensité du problème. (Carbo Media)
Christophe Cassou, climatologue
Pour moi, l’écoanxiété vient aussi de l’inaction : on a peur et on est paralysé par quelque chose sur laquelle on a l’impression de n’avoir aucune prise. Diminuer son écoanxiété n’enlève pas son éco-lucidité – on est lucide qu’on va vers des trajectoires menaçantes – mais on devient moins anxieux si on passe à l’action, en particulier l’action collective. Ça permet de dépasser l’injonction aux petits gestes – qui sont absolument nécessaires – mais qui font porter la responsabilité sur l’individu et maintiennent l’écoanxiété, parce qu’il est difficile de voir que nos actions individuelles participent à un effort plus collectif et donc d’en mesurer la portée. Diminuer ou trier ses déchets, ça ne suffit pas à diminuer son écoanxiété, selon moi. Chacun peut trouver un moyen de s’engager vers la transformation de notre société selon son caractère : faire des actions de désobéissance civile, se présenter à un conseil municipal… Aujourd’hui, il y a beaucoup d’opportunités pour s’engager dans cette transformation vers un mode de vie bas carbone. (Mon Quotidien Autrement).
Juliette Nouel, journaliste engagée
En parlant de la COP28:
Les faits ne sont ni positifs, ni négatifs ; ni optimistes, ni pessimistes.
Ils sont là. Et quand on les regarde, on constate que ni sur l’atténuation, ni sur l’adaptation, ni sur les pertes et dommages, il n’y a eu de vraies avancées.
Il y a certes eu des annonces, mais aussitôt démenties par d’autres faits (voir les déclarations de l’OPEP pour 2024 et de Sultan Al Jaber sur la poursuite de ses investissements pétroliers), des promesses de dons, mais pas du tout à la hauteur des besoins qui se chiffrent en centaines de milliards de $ par an (et non en millions), et globalement un immense délaissement des pays les plus vulnérables et des jeunes générations.
Pour conclure, constater que les faits n’ont rien d’historique ne signifie absolument pas abandonner la bataille.
Comme l’écrit F. Scott Key Fitzgerald dans « La Fêlure » : « On devrait pouvoir penser que les choses sont sans espoir et cependant tout faire pour essayer de les changer ». Simplement par devoir moral, mais aussi parce que physiquement, chaque dixième de degré de réchauffement évité, c’est de la marge manœuvre supplémentaire pour les plus vulnérables et pour nos enfants. (LinkedIn)
On vous invite aussi à (re)lire « Les Écoptimistes » de Dorothée Moisan, que nous avions chroniqué fin août.