Date de sortie : 06 mars 2018
Réalisateur : Delphine Dhilly
Elles ont cédé. Ou capitulé. Ce rapport sexuel, elles n’en voulaient pas. Elles n’ont pas réussi à le repousser, à lui faire comprendre que non, elles n’avaient pas envie. Elles se sont dit, après, que ce n’était pas un viol puisqu’il n’y avait pas eu de violences physiques. Certaines ont rangé ça au rayon des expériences désagréables, mais inévitables, de la jeunesse. D’autres n’ont pas digéré. Voilà ce que raconte le documentaire Sexe sans consentement, réalisé par Delphine Dhilly et écrit par Blandine Grosjean, qui sera diffusé mardi 6 mars, sur France 2.
Blandine Grosjean, journaliste et rédactrice en chef à Elephant &cie, nous parle de ce projet.
Quelle est cette « zone grise » dont il est question dans votre documentaire ?
Blandine Grosjean : Il y a encore trois ans, c’est un sujet dont on ne parlait pas. Cette notion de zone grise correspond à une situation, un acte sexuel, non consenti, auquel on a fini par céder, mais qui n’est pourtant pas associé à un viol car sans violence physique. A l’époque, c’était une étape de la sexualité qui me semblait normale. On disait oui pour ne pas gâcher l’ambiance, pour ne pas passer pour une cruche. C’était pour moi un apprentissage, certes désagréable, mais obligatoire, avant d’atteindre un sexualité plus épanouie.
Pourquoi avoir alors choisi d’écrire un documentaire sur le sujet ?
B.G. : Deux événements ont changé les choses. Un article d’Esther Freud paru dans un journal anglais sur le sujet d’abord. L’affaire Assange, ensuite. Je travaillais alors à Rue89 et nous en avons discuté en conférence de rédaction. Pour ma part, j’avais du mal comprendre que Julian Assange soit poursuivi pour viol par la justice suédoise, alors que la fille reconnaissait l’avoir dragué et avoir eu un premier rapport consenti. De jeunes journalistes de la rédaction n’étaient pas du tout d’accord. Pour elles, il y avait eu viol. Je me suis alors rendue compte que le regard de la société avait changé sur cette question. C’est ce qui m’a donné envie de travailler sur le sujet.
En quoi le regard de la société a-t-il évolué ?
B.G. : Ce sujet dont on ne parlait pas il y a quelques années et qui relevait de l’intime est désormais débattu. Les femmes, surtout les plus jeunes, veulent que la situation change. Elles en parlent entre elles. Elles veulent ouvrir un dialogue, pour que les garçons réalisent également que se montrer trop insistant peut revenir à forcer une fille. L’idée n’est pas de victimiser les filles, mais vraiment d’ouvrir une discussion, de dissiper des potentiels malentendus.
Sexe sans consentement (52′) sera diffusé le mardi 6 mars à 22h55, sur France 2, dans l’émission Infrarouge, présentée par Marie Drucker. Le documentaire sera suivi d’un débat en présence de Marie Darrieussecq, écrivain et psychanalyste, et d’Eric Fassin, sociologue.