Tramways, bus, trains, navettes fluviales… depuis une dizaine de jours, dans l’agglomération nantaise, ils sont tous entièrement gratuits durant les weekends.
De plus en plus de villes font le choix de la gratuité des transports en commun. L’Observatoire des Villes du transport gratuit recense plus de 35 réseaux non payants en France. La plupart concerne des villes de 50 000 à 100 000 habitants. Parmi elles, la pionnière, Compiègne, dans l’Oise, où les transports en commun sont gratuits depuis 1975. Mais aussi Libourne, Gap ou encore Castres. Une poignée compte plus de 100 000 habitants. C’est le cas de Dunkerque, Niort, Aubagne, Calais et Montpellier depuis l’an dernier. Et de nombreuses autres municipalités, comme Lille, Grenoble ou encore Paris se posent la question de la gratuité.
Cette mesure de plus en plus populaire permet de favoriser le développement des transports doux et écologiques. « Certains vont les expérimenter grâce à la gratuité le weekend, et peut-être se laisser convaincre que les bus et trams sont de bonnes alternatives à l’usage de la voiture individuelle », explique dans Le Figaro Bertrand Affilé (PS), vice-président de Nantes en charge des transports.
Gratuité des transports en commun, un effet court terme indéniable
Dans la plupart des villes, une hausse importante du nombre de voyageurs a été enregistrée. A Calais, la fréquentation a augmenté presque immédiatement de 70 % après le passage au gratuit en janvier 2020. Dans l’agglomération d’Aubagne, elle avait augmenté de 230 % sur les lignes régulières l’année suivant la transition.
À Dunkerque, qui a mis en place la gratuité en 2018, la fréquentation a bondi de 85 % en 2019. Et même de 125 % le weekend. La mairie affirme aussi que grâce à cette mesure, 10 % des Dunkerquois ont revendu leur voiture ou renoncé à en acheter. Dans cette ville du Nord de la France, la mesure aurait également permis d’attirer de nouveaux profils. « Les bus accueillent désormais plus d’actifs, notamment des cadres et des employés, explique Patrice Vergriete, le maire DVG de la ville, sur France Info.
Dans certaines agglomérations toutefois, la hausse est plus mesurée. A Niort, la fréquentation moyenne n’a par exemple augmenté que de 30% la première année.
Une mesure en trompe-l’œil ?
Pour être vraiment efficace, la mise en place de la gratuité doit s’accompagner d’un renforcement du réseau. « Le nombre d’usagers augmente toujours lors de la mise en place de la gratuité, mais s’il n’y a pas d’amélioration de l’offre, le taux de fréquentation rechute ensuite », indique Charles-Eric Lemaignen, vice-président du Groupement des autorités responsables de transport (GART) dans un rapport d’information du Sénat, en 2019. C’est notamment le cas à Niort.
Par ailleurs, la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut), estime qu’avec la gratuité, « les moyens financiers des collectivités locales diminuent alors que les besoins de transport public croissent. Or la gratuité monopolise les ressources nécessaires pour investir et renforcer l’offre ». A l’étranger, certaines villes y ont d’ailleurs renoncé en raison de son coût excessif. C’est le cas de Bologne en Italie, Seattle aux Etats-Unis ou encore Castellon de la Plana en Espagne.
Pour la Fédération, la gratuité constitue un trompe-l’œil, malgré des avantages « indéniables à court terme » (montée et descente plus rapide, frais de billetterie et de contrôle en moins, fin des conflits entre usagers et contrôleurs…). Elle rappelle qu’il n’est pas nécessaire de rendre les transports gratuits pour favoriser leur usage : « On peut augmenter fortement la fréquentation en améliorant l’offre (priorités de circulation, fréquences renforcées) ; en réduisant l’espace accessible à la voiture et en augmentant le coût du stationnement ; ou encore, comme à l’étranger, en introduisant le péage urbain », détaille-t-elle. Le péage urbain, qui existe notamment à Londres, consiste à rendre payant l’accès au centre-ville des agglomérations pour limiter le trafic automobile.