On le connaît tous ce coup de barre fatidique une fois le déjeuner avalé. Bâillements, membres tout engourdis, paupières lourdes: l’envie de dormir pointe son nez. Alors que les bienfaits du roupillon sont de plus en plus vantés, il reste difficile de « siester » au travail. “La baisse de vigilance ou fatigue l’après-midi est une réalité vécue quotidiennement par l’ensemble des individus et notamment des salariés” explique-t-on sur le site de Sixta, une société de conseil qui intervient au sein des entreprises pour implanter la sieste. “Cette fatigue s’explique par plusieurs facteurs. D’une part, comme le met en évidence la chronobiologie, la sieste correspond à un besoin physiologique de sommeil chez l’homme. Mais à cela s’ajoute le contexte actuel (télévision, Internet, horaires, stress) qui plonge les Français dans une lourde dette de sommeil. En effet, les derniers chiffres de l’INSV (Institut National du Sommeil et de la Vigilance) indiquent que nous dormons en moyenne 7h15 (6h58 en semaine), soit 1h de moins qu’il y a 20 ans, 1h30 de moins qu’il y a 50 ans et 2h de moins qu’il y a 1 siècle ! Le sommeil est, plus que jamais, un sujet prioritaire.”
Plus intelligent
Paradoxalement, piquer un micro-somme au beau milieu de la journée serait synonyme de productivité. Selon une étude menée par le docteur Matthew Walker, dormir une heure par jour permettrait “d’optimiser les fonctions neurocognitives”. Mais augmenterait également l’imagination, la rapidité d’apprentissage, réduirait le stress, améliorait la concentration, libérerait la créativité….En bref, en plus de recharger les batteries, le « sieston » rendrait plus intelligent. En Chine, la sieste est un droit inscrit dans la Constitution. Au Japon, elle peut être imposée aux salariés. Aux Etats-Unis, pioncer la journée est banal chez Nike ou Google.
« Bulles de sieste »
Alors que le ministre du travail Xavier Bertrand annonçait en 2007 vouloir en faire un sujet prioritaire, la France semble paresser sur le sujet. Certaines sociétés ont investi le créneau pour aider à l’installation d’espaces de détente en milieu professionnel et des boites, petites ou grandes, franchissent le pas. Comme chez Novius, un éditeur de logiciel basé à Lyon où le patron donne l’exemple, ou au sein du cabinet d’audit et d’expertise comptable Pwc PriceWaterhouseCoopers, à Neuilly-sur-Seine, où des « bulles de sieste », des endroits cosy pour se relaxer, accueillent les collaborateurs.
Manque à gagner
Reste que dans notre société qui vante l’efficacité, cette pratique reste rare en entreprise. Le cliché sieste = fainéant ou bambocheur est toujours vivace. Dans le contexte de crise actuel, dormir au travail peut ne pas être très bien perçu. Même Jacques Chirac qui a signé la préface du livre de Bruno Comby “Eloge de la sieste” paru en 2005, soulignait cette difficulté : “Ce n’est pas facile chez nous où le fait d’évoquer le repos suscite souvent la plaisanterie. Pourtant comme il est maladroit de confondre sommeil et paresse!” Il est bon de rappeler que la fatigue a un coût: selon la National Sleep Foundation, une ONG américaine, le manque de sieste au boulot représenterait un manque à gagner de 18 milliards de dollars par an pour l’économie américaine. Pour travailler plus, mieux vaut ronfler plus!